VOYAGES AU LONG COURS
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Le 9 décembre 2003, de Cayenne (Guyane française) |
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Macapá est une ville tranquille sur les bords de l'Amazone. Nous y avons passé vingt-quatre heures, le temps de faire quelques dernières courses au Brésil, car après il n'y a plus grand-chose. Environ 650 km séparent Macapá d'Oiapoque, la ville qui se trouve sur le fleuve du même nom, frontière avec la Guyane française. Une petite moitié de la route est goudronnée (en excellent état, d'ailleurs). Après, on sent qu'on approche de plus en plus du bout du monde.
La piste est d'abord très large et bien stabilisée. De nombreux engins de chantier attestent du fait que le goudronnage est prévu pour bientôt. Mais petit à petit les choses se dégradent : chaussée plus étroite, ponts en bois au lieu d'être en béton... Les villages traversés se composent de maisons en bois et ne respirent guère l'opulence.
Devant nous, soudain, un pick-up en travers de la route : il n'a plus de roue à l'avant gauche. Le conducteur nous explique qu'il l'a perdue en roulant. Enfin, perdue, c'est une façon de parler puisqu'elle se trouve maintenant dans la benne. Par contre, l'écrou qui la maintenait en place a disparu. Rémi regarde.
- Vous avez aussi perdu le système de freinage ? S'étonne-t-il.
- Non, répond l'autre très calmement, il n'y en avait pas. Je l'ai enlevé...
Evidemment, tout le monde sait que les freins ne servent à rien sur un véhicule, surtout à l'avant !
Une grande zone au nord de Macapá est "terre indigène". L'arrêt y est interdit. Pour protéger les indiens qui y vivent, sans doute. Mais ils n'ont pas besoin de notre passage pour être pollués par la civilisation : ici comme ailleurs, les antennes satellite sont nombreuses.
La forêt se fait de plus en plus envahissante. Plus dense aussi. Elle semble même impénétrable. La nuit tombée, toutes sortes de bruits s'élèvent autour de notre petit fourgon stationné au pied d'arbres gigantesques. La vie semble grouiller partout.
A Oiapoque, nous nous mettons en quête de la barge qui doit nous faire traverser le fleuve. Car il y en a une, même si la gendarmerie de Cayenne nous a soutenu le contraire. Mais c'est vrai qu'elle se trouve au Brésil...
Après quelques heures de recherche, il faut bien se rendre à l'évidence : la barge existe bel et bien mais comme il y en a une seule les prix sont ahurissants. On nous annonce en effet 160 € pour une traversée qui ne devrait pas excéder une heure de temps, alors que les quarante heures de Belém à Macapá nous avaient coûté à peine 136 €... Rémi réussit malgré tout à faire un peu baisser le tarif. Ce sera "seulement" 130 €. Ou plutôt 145 USD puisque c'est la seule monnaie dont nous disposons. Départ prévu le lendemain après-midi.
En attendant, nous découvrons Oiapoque, petite ville frontière qui vit beaucoup plus tournée vers la Guyane que vers le Brésil. Nous y retrouvons quelques touristes. Souvent des hommes, accompagnés de jeunes Brésiliennes. La prostitution occasionnelle doit être florissante. Les prix y sont bien plus élevés qu'à Macapá, notamment en ce qui concerne les fruits et légumes. Mais nous découvrirons bientôt que cela reste TRES bon marché par rapport à la Guyane.
Lundi 10 novembre, dans la matinée, nous faisons les formalités de sortie du Brésil. Le départ de la barge est prévu pour 16 h, mais ce n'est que trois quarts d'heure plus tard que nous levons effectivement l'ancre. Luis, le pilote (et propriétaire) assure la manœuvre en short. Saint-Georges de l'Oyapock, le village français qui fait face à Oiapoque, se trouve en aval. Mais la marée commence à monter, ralentissant notre progression. Il nous faudra une heure et demie pour arriver à bon port.
Enfin, Saint-Georges apparaît devant nous avec sa place éclairée par les lampadaires et sa mairie qui fait face au fleuve. Pour l'arrivée, Luis et son mécanicien ont revêtu des bleus de travail flambant neufs aux couleurs de la compagnie, histoire de faire plus sérieux. A la douane, les deux fonctionnaires semblent très occupés. L'un d'eux, les pieds sur le bureau, passe manifestement un coup de fil personnel en métropole.
- Je te rappelle dans une demi-heure, lance-t-il en raccrochant.
Son collègue, qui caressait une jeune Brésilienne assise sur ses genoux, envoie sa compagne patienter dans la pièce mitoyenne pour s'occuper de nous. Tout cela fleure encore bon la colonie ! Les formalités sont néanmoins rapides : après tout, nous entrons en France. Dans la rue, pourtant, la plupart des gens parlent encore brésilien. Et même pour aller à la boulangerie il vaut encore mieux utiliser le portugais. Mais de petits détails nous renvoient tout de même à notre pays d'origine : l'enseigne jaune de La Poste, une camionnette EDF, un panneau de Loto chez un buraliste...
Quatre-vingt kilomètres séparent Saint-Georges d'un autre fleuve : l'Approuague, au bord duquel se trouve la petite ville de Regina. Une route a été construite il y a quelques années et les quarante premiers kilomètres sont goudronnés. Le reste du trajet se fait sur une belle piste de latérite en cours de stabilisation pour un futur goudronnage. Au bout de ces 80 km, un pont est en construction sur le fleuve. Le gros oeuvre est déjà terminé et les fourgonnettes stationnées dessus nous montrent qu'il supporte sans problème le passage de véhicules. Mais il n'est pas encore officiellement ouvert à la circulation, même si douaniers, gendarmes et pompiers l'utilisent déjà couramment. Pour les autres, il y a une barge qui traverse matin et soir. A moins que...
- Si vous avez leur autorisation, je vous ouvre la barrière, nous dit le gardien.
Sur ces entrefaites, une voiture arrive. Au volant, une jeune Brésilienne. A côté : un homme blanc d'un certain âge qui s'avère être un fonctionnaire des douanes. Qui nous refuse, bien sûr, l'autorisation de passer. Pour lui, le gardien ouvre cependant la barrière. Mais comme il a plu, les pneus de la voiture sont boueux. Il faut les laver. Le douanier toise le gardien :
- Et qui est-ce qui va le faire ?
L'homme ne répond rien, mais descend au bord du fleuve remplir un seau d'eau. Bientôt, il a les mains dans la boue. L'autre le regarde faire tout en discutant avec sa copine... Le petit chef expatrié dans toute sa splendeur !
Il y a deux heures que nous sommes garés au bout du pont. Oh, il y aurait bien moyen de le traverser : pour cela, il suffirait de payer 50 €. Rien que ça ! Sinon, la barge amarrée en face peut venir nous chercher, mais on nous demande pour cela pas moins de 100 €. Pas question de payer ! En plus, nous n'avons pas d'euros... Par contre, nous sommes patients.
La nuit est déjà tombée lorsque la barge accoste de notre côté avec deux véhicules à son bord. Un homme que nous n'avons pas encore vu en descend et s'approche.
- Vous voulez traverser ? Demande-t-il à Rémi.
- Oui, mais je n'ai pas d'argent pour payer. Juste une bouteille de whisky...
- Bah, répond l'autre, je ne vais quand même pas vous laisser plantés là avec les enfants. Venez.
En fait, comme il fait nuit noire et que la barge n'est pas équipée de feux, il a besoin de nos phares pour voir où accoster !
Regina ne nous retient que le temps d'une nuit avant de reprendre la direction de Cayenne. Sur ce tronçon, la route est plus ancienne : elle est étroite, sinueuse, pas toujours en bon état et joue aux montagnes russes entre les collines. De chaque côté : la forêt.
Quelques kilomètres après avoir bifurqué vers Cacao, une construction anachronique nous arrête : un mini château médiéval en bois se dresse sur le bord de la route... Son occupant, Pascal, est un passionné de reptiles. Il en possède plusieurs qu'il se fait un plaisir de nous présenter. Samuel, habituellement timide, lui pose question sur question et lorsque Pascal lui propose de manipuler une grande couleuvre noire et jaune de deux mètres de long, il est aux anges !
Pascal nous amène ensuite chez Joël, deux maisons plus loin. Il est marié à une Bolivienne, père de jumeaux de neuf ans qui vont vite devenir les compagnons de jeu de Samuel et Elisa et il fabrique des bijoux qu'il vend ensuite au marché. Pour cela, il utilise beaucoup de graines, mais aussi des carapaces d'insectes aux couleurs chatoyantes. Devant son atelier, c'est au tour d'Elisa de flotter sur un petit nuage...
Cacao est un petit village tranquille, sur les bords de la rivière Comté. La plupart de ses habitants sont des Hmongs réfugiés du Laos. Il y a 26 ans qu'ils ont créé le village de toutes pièces et c'est assez drôle d'entendre ces Français sud-américains parler leur langue asiatique ! Les plus vieux portent encore le béret (importé par les Français en Indochine) et le dimanche après-midi tous les hommes se retrouvent sur la place du village pour jouer à la pétanque. Il y a aussi le marché du dimanche matin qui attire beaucoup de monde, avec ses broderies et ses stands de nourriture laotienne.
Nous passerons quelques jours à Cacao avant de rejoindre Cayenne, profitant de la rivière et de la tranquillité des lieux. Rémi et Samuel vont également partir quelques heures en forêt avec Pascal pour découvrir la faune locale. Mygales, grenouilles et insectes de toutes sortes sont au rendez-vous. Mais aucun serpent. Samuel est évidemment déçu : c'est pour en voir en liberté qu'il avait voulu partir en forêt. Mais sans doute l'heure (dans la matinée) n'était-elle pas propice à de telles rencontres.
A Cayenne, nous commençons par nous préoccuper de l'assurance pour le fourgon : la nôtre avait été résiliée lors de notre départ. Nous allons aussi essayer de faire réparer pour de bon notre ordinateur. Enfin, un courrier électronique nous apprend que le deuxième lot de cours du CNED est arrivé. Reste à l'acheminer jusqu'en Guyane. Nous profitons également de ce retour en terre française pour faire quelques courses : de la moutarde forte, de vraies éponges, du liquide vaisselle qui lave vraiment. Autant de choses toutes bêtes qui se sont révélées introuvables ailleurs. Par contre, les prix pratiqués sont ahurissants : tomates à près de 5 € le kilo, chou-fleur à près de 6 €. Même les fruits locaux (bananes, ananas) coûtent plus cher qu'en métropole !
A Cacao, nous avions fait la connaissance de Franck, un fonctionnaire qui passe la plupart de son temps libre à parcourir les nombreux cours d'eau de Guyane. A Cayenne, nous le retrouvons chez lui, avec Isabelle. Surprise : il élève des mygales. Samuel ne s'approche pas trop : ces petites bêtes poilues ne lui inspirent aucune sympathie. Mais quand il découvre que Franck possède également un boa émeraude, c'est autre chose ! Il ne pourra pas le toucher, mais le regardera, subjugué, faire son repas d'une souris.
Les premiers soirs, nous dormons, comme Franck nous l'a conseillé, sur l'immense parking de la mairie de Rémire-Montjoly. Mais le deuxième matin, une employée de la police municipale nous demande de partir : il paraît que nous gênons. Le soir suivant, nous nous installons donc juste à côté, sur le terrain de l'église. Las, cette fois, ce sont deux policiers (municipaux, toujours) qui viennent nous sommer de manière très agressive de déguerpir. De quel droit ? Nous ne sommes pas sur un terrain public et le prêtre ne les a certainement pas appelés puisqu'il nous a dit que nous ne le gênions pas. Nos deux Starsky et Hutch, cachés derrière leurs lunettes noires, finissent par s'en aller en nous laissant deux heures pour partir. Un peu plus tard, c'est au tour des gendarmes de se présenter. Ils se montrent heureusement beaucoup plus civilisés.
En tout cas, en attendant d'en savoir plus sur l'ordinateur, nous préférons retourner quelques jours à Cacao. L'endroit nous plaît bien et s'avère bien plus tranquille ! Par contre, nous découvrirons à nos dépens qu'il ne s'y trouve aucun téléphone public. La cabine existe bel et bien mais ne contient pas d'appareil. Quant au libre-service (qui fait office de téléphone public pour les gens du village) il refuse de nous laisser appeler à Cayenne. Cette fois encore, ce sera la gendarmerie la plus compréhensive.
- L'ordinateur est réparé, vous pouvez venir, nous dit-on.
Le lendemain, nous faisons donc nos adieux à Joël et sa petite famille et retournons à Cayenne. Là, nous découvrons ce que nous soupçonnions déjà, à savoir que notre appareil fonctionne toujours de manière aléatoire. Rien n'a donc changé...
- Cette fois, ils veulent changer la carte-mère et le processeur. J'ai bien peur que ça prenne trois semaines, me dit Rémi.
Nous voilà donc scotchés en Guyane. Pas vraiment ravis. Outre le fait que le coût de la vie y est exorbitant, la mentalité générale et les sempiternelles frictions interethniques ne nous donnent pas envie de nous attarder. Seul Samuel y trouve son compte puisque nous repassons chez Franck dans l'après-midi. Le boa étant au repos, il peut le prendre dans ses mains. Ravi de me voir trembler dès que l'animal approche sa tête de moi...
Nous faisons aussi la connaissance de Smet, rencontré via Internet grâce à Caroline et Yannick (voir nos "Sites à visiter"). Il tient un magasin d'informatique et ne nous rassure guère sur les délais de réparation. Surtout à cette période de l'année... Même la fusée Ariane nous fait faux-bond : le lancement prévu début décembre est finalement reporté à fin février.
Pour passer le temps, nous prenons d'abord la direction de Roura, puis de Kaw, mais aucun endroit ne nous satisfait vraiment. Roura est bien un petit village très agréable mais les abords du fleuve sont trop boueux pour que l'on puisse s'y baigner.
- Bon, si je comprends bien, on retourne à Cacao ?
Là, nous sommes accueillis par un Joël hilare :
- Alors, vous avez décidé de vous installer ici ?
Petit à petit, les gens s'habituent à nous voir. Des contacts se créent, encore fragiles, mais nous faisons quand même partie du paysage. Nous avons même rencontré un Hmong qui a vécu dans le Tarn : il travaillait à Coupiac, à quelques kilomètres à peine de notre village de Trébas.
Chaque matin, Rémi passe à la boulangerie. Ensuite, il y a l'école qui nous occupe grosso modo jusqu'à midi. Après le repas, séance de natation dans la Comté. Souvent sous la pluie car la saison sèche est bel et bien terminée. Les barques entreposées près de l'embarcadère servent de plongeoir. Samuel et Elisa sont désormais très à l'aise, même si pour cette dernière les mouvements de brasse sont loin d'être académiques.
Ce week-end, Franck et Isabelle nous ont fait la surprise de nous rejoindre avec leur barque. Ils nous ont offert une petite balade sur la Comté. Au menu : découverte de la rivière, baignades, repas dans un carbet (construction de bois largement ouverte dans laquelle on suspend son hamac), promenade en forêt et bonne humeur. Tout ce qu'il faut pour se mettre à apprécier la Guyane !
De retour à Cayenne "pour voir", une bonne surprise nous attend : l'ordinateur fonctionne. Pour nous, c'est un peu Noël avant l'heure, même si nous nous demandons forcément combien de temps cela va durer... En tout cas, cela nous permet de vous donner quelques nouvelles... et de vous souhaiter d'ores et déjà un très joyeux Noël !
Grosses bises à tous et à la prochaine.
Rémi - Flo - Samuel - Elisa |
Carnets de route
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