Une famille autour du monde
 

MISSIONS HUMANITAIRES

 Sierra Leone 2005-2006
 Sri Lanka 2000-2001
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     Le 24/06/2001
     Le 06/07/2001
 Angola 1996-1998

À Colombo

Compteur visiteurs

 

Le 27/09/2000 : premières visites terrain

Nous avons six projets au Sri Lanka. Entendez par là six lieux d'activité. À Batticaloa, il y a six expatriés : une infirmière RT (responsable de terrain) australienne chargée des contacts avec les autorités et de "diriger" l'équipe, un log-admin (logisticien-administrateur) russe qui s'occupe des travaux de réhabilitation dans l'hôpital et de l'administration générale de la mission, deux chirurgiens (une française et un hollandais) qui opèrent à tours de bras (l'hôpital compte 160 lits en chirurgie), une infirmière de bloc allemande qui les assiste et essaie d'améliorer les conditions d'hygiène et un médecin bangladeshi qui fait ce qu'on appelle des "cliniques mobiles". L'idée est simple : puisque les gens ne peuvent pas se déplacer vers l'hôpital, c'est l'hôpital qui va vers eux. Un véhicule aménagé en ambulance, un médecin, une infirmière, des médicaments, éventuellement une sage-femme ou un dentiste, et vogue la galère. Les déplacements sont bien sûrs strictement contrôlés. On ne part pas en clinique mobile tant que les deux côtés (SLA et LTTE) n'ont pas donné leur feu vert. L'ambulance est clairement identifiable : sigle de notre ONG sur tous les côtés, drapeau à l'arrière, énorme croix rouge et numéro d'immatriculation peints sur le toit, gyrophares bleus allumés même en plein jour et sur une route déserte... Chaque véhicule est équipé d'une radio et donne régulièrement sa position à l'opérateur qui est en stand by au bureau. Toutes ces précautions sont loin d'être superflues : il y a quelques années, une voiture de notre ONG s'est fait tirer dessus par un hélicoptère... Le chauffeur et un expatrié ont été blessés.
Clinique mobile Vavuniya est la grande ville la plus proche de la ligne de front. Il y a là-bas quatre expatriés : un chirurgien américain, un anesthésiste tchèque et une infirmière de bloc suédoise qui font tourner le bloc opératoire de l'hôpital et une log-admin RT française qui s'occupe des (nombreux) contacts avec les autorités (militaires), de l'administration de la mission et qui devrait bientôt suivre des travaux de réhabilitation dans l'hôpital.
Murunkan est un petit village, à quelques centaines de mètres de la ligne de front (matérialisée par la route qui va de Vavuniya à Mannar) et, paradoxalement, c'est un endroit très calme, très paisible. Quand on n'entend pas le bruit des armes ! L'hôpital est petit et il y a peu de patients. Là-aussi, on a fait un peu de réhabilitation. Et des cliniques mobiles desservent les plus petits villages. Il y a eu jusqu'à quatre expatriés. Aujourd'hui, il n'y a plus qu'une infirmière RT française et la mission va fermer fin décembre.
Madhu est un autre petit village. Mais celui-ci se trouve de l'autre côté de la ligne de front, en zone Tigre. L'accès n'en est pas facile ; la route n'est ouverte que les mardi et vendredi, à certaines heures. Il y a trois expatriés : un médecin australien, une infirmière RT française et une sage-femme australienne. Notre ONG se charge de faire fonctionner un petit hôpital d'une vingtaine de lits et d'assurer des cliniques mobiles. Comme il y a un camp de déplacés juste à côté, les "clients" ne manquent pas.
Jaffna et Point Pedro se trouvent dans la péninsule de Jaffna, tout au nord de l'île. Depuis que la guerre a coupé le pays en deux, on ne peut plus y accéder par la route. On doit donc se rendre à Trincomalee, sur la côte est, aux deux-tiers nord environ, et là on embarque sur un bateau affrété et piloté par le CICR. Celui-ci nous amène sur la péninsule. Le lieu de débarquement peut changer, en fonction des événements. La péninsule est la zone la plus instable actuellement. Les combats sont réguliers ; les morts et blessés sont nombreux des deux côtés.
Le réservoir d'eau de Madhu Avant la guerre, le JTH (Jaffna Teaching Hospital) était le deuxième plus grand hôpital du pays, avec plus de 1000 lits et toute une flopée de spécialistes en tous genres. Inutile de dire qu'aujourd'hui ils se sont tous sauvés à l'étranger... Il y a encore quelques mois, il y avait deux pédiatres de notre ONG qui faisaient tourner le service de pédiatrie et une sage-femme qui faisait de la formation auprès des "midwives" traditionnelles. Le gouvernement ayant fini par affecter un pédiatre à cet hôpital, il n'y a plus qu'un seul expatrié (américain). La sage-femme, quant à elle, est partie en juin parce que la reprise des combats dans la zone ne permettait plus d'assurer un programme de formation. Par contre, une infirmière australienne est arrivée, qui est chargée d'enquêter sur les conditions d'hygiène et de santé des (nombreux) déplacés.
À Point Pedro, il y a un log-admin RT français (qui supervise aussi ce qui se passe à Jaffna), une chirurgienne italienne, une anesthésiste allemande et un médecin généraliste australien dont le travail est surtout axé sur la gynécologie-obstétrique. Tous ces braves gens travaillent à l'hôpital. Là-aussi, un peu de réhabilitation est en cours.
Globalement, l'état des hôpitaux est assez médiocre. Bâtiments sales, mal entretenus, matériel rouillé jusque dans les salles d'opération... Mais c'est surtout au niveau de l'hygiène et de la gestion des déchets qu'il y a à faire. Personne n'est choqué à la vue de vaches, chiens, chèvres, poules ou cochons qui viennent tranquillement, dans l'enceinte d'un hôpital, se nourrir sur des tas d'ordures comprenant aussi bien des épluchures de légumes que des vieux pansements ou des placentas. Les corbeaux sont omniprésents. Les eaux usées s'écoulent n'importe où et les aiguilles de seringues usagées sont monnaie courante. Les choses changent, bien sûr, mais c'est très lent. Et puis, il faut compter avec les croyances locales. Ici, les animaux sont sacrés. Les nourrir est une bonne action qui peut permettre d'améliorer son karma. Dans ces conditions, pourquoi les empêcher de manger ce qui leur plaît dans les poubelles ?
Pour l'instant, j'ai visité Batticaloa, Vavuniya et Murunkan. Huit jours en tout : départ de Colombo le 12/09 à 4h du matin et retour le 19/09 à 20h30. Rémi assurait la garde auprès des enfants. Jusqu'à ce qu'il parte, à son tour, le 19/09 à 4h du matin ! Pas de panique : les enfants ne se sont pas retrouvés tous seuls au milieu de la nuit pour autant ; notre employée était venue dormir à la maison. Actuellement, Rémi est sur la péninsule. Il revient demain soir... et moi je repars après-demain matin ! Cette fois, destination Madhu. Toujours avec Françoise, l'administratrice que je remplace. Retour à Colombo le 03/10 et cette fois, la famille va être au complet. Mais juste pour une semaine : le 10/10, c'est à mon tour d'aller sur la péninsule. Seule, cette fois, puisque Françoise repart pour la France le 12/10. Je reviens à Colombo le 19/10 et là, ça devrait se calmer, au moins pendant quelques semaines.
Bâtiment détruit de Point Pedro Dans tout ça, on passe beaucoup de temps sur la route. Les distances ne sont pas astronomiques mais le trafic est dense, les routes pas toujours en très bon état et les "check points" (contrôles militaires) sont nombreux. On fonctionne beaucoup par "kiss movements". Par exemple, si quelqu'un de Colombo doit aller à Batticaloa, un chauffeur de Colombo l'amène jusqu'à Habarana (à peu près au centre du pays) où un chauffeur de Batticaloa va venir le récupérer. Comme ça, les chauffeurs reviennent à leur point de départ, au lieu de se retrouver coincés à l'autre bout du pays pour la nuit. Comme Habarana est un point de passage quasi-obligé pour aller sur Vavuniya (à partir duquel on va éventuellement à Madhu ou Murunkan), il n'est pas rare que trois voitures s'y retrouvent, échangent passagers et marchandises, et repartent chacune vers leur mission d'origine.
À Colombo, l'équipe expatriée se compose de quatre personnes. Le chef de mission, Manuel, est colombien. Il a travaillé pas mal de temps en Amérique Latine pour une ONG espagnole. Ses parents habitent en France. Il parle parfaitement espagnol, français et anglais. Il est ici avec sa femme, colombienne d'origine (mais avec un passeport britannique) qui travaille dans une ONG sri lankaise qui milite pour la paix. Ils sont très sympas tous les deux. Manuel est quelqu'un avec qui on peut discuter. L'étiquette de "chef" ne lui est absolument pas montée à la tête et ça devrait être un plaisir de travailler avec lui.
Ensuite, il y a Marina, la coordinatrice médicale, qui est georgienne. Elle a travaillé pour notre ONG en Georgie, Arménie, Afghanistan. On communique avec elle en anglais. C'est d'ailleurs la langue "officielle" pour tous les écrits de la mission : la moitié des expatriés ne sont pas francophones.
Le responsable logistique que Rémi a remplacé avait aussi fait plusieurs missions. Quant à Françoise, que je vais remplacer, c'était sa première mission. En fait, elle travaille dans un cabinet d'audit. Ce qui l'a amenée à intervenir au siège de notre ONG, à Paris. Puis à prendre un an de congé sans solde pour voir ce que c'était sur le terrain.
Le bureau de Colombo Manuel est le plus ancien sur la mission. Il est arrivé en août 1999 et devrait rester jusqu'en février 2001. C'est quand même peu. A côté, le personnel sri lankais fait figure de dinosaure. Certains travaillent pour notre ONG depuis sept ou huit ans. Au total, nous avons une quinzaine d'employés à Colombo. Deux chauffeurs de voiture, un chauffeur de touk-touk, un chauffeur-acheteur qui fait toutes les courses nécessaires, un comptable, un assistant logistique, une réceptionniste qui va devenir secrétaire (une nouvelle réceptionniste arrive la semaine prochaine), un cuisinier, une femme de ménage, une lavandière, un "rat de bureau" chargé des photocopies et autres tâches du même genre et trois gardiens. Suhantan, l'assistant de Rémi, est un gars jeune, motivé et qui a envie d'apprendre plein de choses. Il devrait le seconder plus qu'efficacement. Rien à voir avec le comptable ! Il travaille pour notre ONG depuis 6 ou 7 ans et il fait toujours des erreurs de débutant. En plus, on ne peut pas dire qu'il soit très énergique. Sa préoccupation majeure a l'air d'être d'en faire le moins possible : ça promet !
Et les enfants dans tout ça ? A vrai dire, il ne nous reste pas beaucoup de temps pour eux. Ils ont évidemment un peu de mal à s'y faire... Le matin, on les amène à l'école pour 8h. Kavita va les chercher en touk-touk à 14h. Et l'après-midi est bien longue puisqu'on est rarement de retour avant 19h. Surtout que Kavita ne parle évidemment pas un mot de français. La communication n'est donc pas encore facile. Quand ils sauront se débrouiller en anglais, ça ira sans doute mieux. Résultat : Samuel a appris par coeur les trois numéros de téléphone du bureau et il appelle en général deux fois dans l'après-midi...
À l'école, par contre, tout va bien. Elisa trouve que "le maître est très gentil". Samuel a déjà une amoureuse (la meilleure de la classe en anglais) et son instituteur ne tarit pas d'éloges à son sujet. Tous les soirs (sauf le vendredi), il a un petit devoir à faire. Ce n'est pas bien long mais ça raccourcit d'autant notre temps libre ensemble.
Hier soir, il y avait une réunion d'information pédagogique à l'école. J'ai pu voir à quoi ressemblaient les autres parents d'élèves. En fait, je connaissais déjà nos voisins du CICR et le directeur de l'école (qui a son fils en CP). Ceux que j'ai découverts hier m'ont vraiment donné l'impression de vivre dans un monde parallèle. Diplomates ou assimilés, ils vivent leur existence d'expatriés de luxe comme si le Sri Lanka n'existait pas. Les mères ne travaillent pas, en général, et discutent de bronzette à la piscine ou cassent du sucre sur le dos de leurs employés de maison.

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